Pourquoi pas – Chapitre 2 – L’animatriste
L’animatriste
Lydie, c’est l’animatrice de notre groupe.
La cinquantaine bien tassée, assez petite et plutôt boulotte, cheveux courts, gris, coiffés sans goût. C’est marrant comme les femmes se coupent les cheveux en prenant de l’âge. Elles finissent par toutes se ressembler. Comme des écoliers de CM1 le jour de la rentrée de septembre.
Pas de bijoux, pas de maquillage, pas de parfum qui nous permettrait de la reconnaître à cent pas. Ah non, elle ne pue pas, non. Elle ne sent rien. Ni bon, ni mauvais. Parfum et allure aussi triste que sa coiffure c’est vous dire ! On ne peut pas dire qu’elle respire la joie et le bonheur.
Mon copain René l’a surnommée l’animatriste. Et j’ose penser que ça lui va bien ! Il faut dire qu’elle n’a pas le sourire facile la Lydie. Je crois bien que je ne l’ai jamais entendue rire une seule fois ! Non, pas une fois ! Et pourtant, on en raconte des âneries en trois heures !
C’est marrant, il y a des gens, comme ça qui respirent la tristesse comme d’autres transpirent la bonne humeur. Tu as beau faire le guignol, raconter des conneries, te payer des fou-rires, ils ne se dérident pas.
Lydie, elle est comme ça.
Je ne sais pas, je ne connais rien de sa vie, mais ça n’a pas dû être rose tous les jours.
Peut-être a-t-elle eu une enfance difficile avec un père qui la malmenait et une mère sévère mais juste, comme dans les films qui attirent la larme.
Peut-être un mari pas commode qui lui mène la vie dure, peut-être des enfants difficiles à gérer.
Ou peut-être rien de tout ça.
Elle est comme ça épissétou, comme dit mon fils.
Elle s’habille triste, elle parle triste, elle pense triste, elle n’a jamais le mot pour rire, elle ne réagit pas à nos bêtises (pas toujours très fines), elle ne comprend pas les jeux de mots, les blagues à deux balles, les contrepèteries dont je suis le spécialiste.
Comme disait mon père, elle rigole quand elle se brûle. Ce qui est un peu dommage.
Nous, on aimerait bien qu’elle soit un peu plus dynamique, qu’elle nous booste un peu, qu’elle nous secoue les neurones, qu’elle nous fasse croire qu’on est encore vivants en un mot.
Parfois, on en a besoin !
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